Les phrases cultes du Capitaine
« Capitaine, s’il est vrai que de votre vivant vous jurâtes comme un païen, fumâtes comme un Suisse et bûtes comme un sonneur, que néanmoins votre mémoire soit honorée ! » (Anatole France, dans Le crime de Sylvestre Bonnard)
Du Crabe aux pinces d’or à L’Alph’Art, Haddock est présent dans tous les albums des aventures de Tintin à partir de son apparition, en alcoolique désœuvré, dans sa cabine du Karaboudjan. Si Tintin est le héros et Tournesol le génie, Haddock est le Capitaine. Il a du caractère. Il a le verbe haut et la langue bien pendue. Auteur de plusieurs ouvrages dans la collection 1000 sabords consacrée à l’univers de Hergé, Pierre Bénard décide ici de suivre le marin barbu, cordial et braillard, au travers de ses répliques. En de courts chapitres de trois à quatre pages, l’auteur décortique les principales réparties de Haddock. Embarquons tous à bord, le navire va appareiller.

« Salut, Wizskizsek ! » Etonnamment, la phrase qui démarre la série n’a pas été dite par Haddock. Et pour cause, elle est issue du Sceptre d’Ottokar. Si l’auteur la cite, c’est parce qu’elle a été prononcée par un personnage préfigurant le Capitaine. Sirov, paysan syldave mal dégrossi, répond au téléphone. On lui ordonne d’intercepter Tintin. Haddock en gardera le côté bourru, mais avec un côté beaucoup plus sympathique quand même. Pierre Bénard déniche ici des indices auxquels personne n’avait songé avant lui. Haddock se trouvait malgré lui du côté des trafiquants dans Le crabe aux pinces d’or. En créant ce personnage, Hergé ne pouvait pas imaginer la dimension qu’il prendrait dans la série. Pour un peu, Sirov aurait pu devenir le compagnon de route de Tintin à sa place.

« On me laisse mourir de soif ! » est une phrase culte du Crabe. Le vieil ivrogne, comme l’appelle Allan, réclame du whisky. On ne sait comment il est tombé dans l’addiction, mais il ne peut s’en passer. C’est dans un état certain d’ébriété que Tintin le découvrira dans sa torpeur. Plus tard dans l’album, il lui promettra de ne plus boire. « Le pire ennemi du marin… » commencera-t-il en tant que conférencier. On sait pourtant qu’il ne poursuivra pas sa carrière à l’eau.
C’est dans L’étoile mystérieuse qu’il lancera pour la première fois son fameux « Tonnerre de Brest ! ». Il la prononcera douze fois dans l’album. C’est aussi dans cette histoire que, ordonnant au prophète Philippulus de descendre de son mât, il terminera pour la première fois sa phrase par un « Mille sabords ! » qui deviendra tout aussi célèbre. Dans Le temple du soleil, à Callao, il paraphrase Ray Ventura avec un optimisme avéré : « Tout va très bien ! ». Il invoquera à nouveau l’artiste dans L’affaire Tournesol, demandant à Nestor « Quelles nouvelles ? », à Moulinsart bien entendu.

« Des montagnes, toujours des montagnes ! », « Espèces d’Inca de carnaval ! », « Ah ! Le calme. Ah ! Le silence… Ecoutez-le, ce silence… », « Le diable l’emporte, lui, ses assurances et son oncle Anatole ! », « Ha ! Ha ! Ha ! Ce cher rossignol milanais ! ». On découvre grâce à Pierre Bénard combien les phrases de Haddock sont ancrées dans nos esprits de lecteurs. « On ne fait pas d’un coup le tour du Capitaine Haddock » précise l’auteur de l’essai dans sa conclusion. Il en fait pourtant dans ce livre un portrait détaillé par le biais de ses interventions orales. On a ainsi l’impression de le connaître encore mieux, avec l’envie de se replonger dans les albums avec une focale sur lui. Quand on a fini de lire Tintin, on peut recommencer à lire Tintin. On y trouvera toujours quelque chose de nouveau.
One shot : Haddock a dit…
Genre : Ouvrage d’étude
Auteur : Pierre Bénard
Illustrations : Xavier Broxolle
Éditeur : 1000 sabords
ISBN : 9782494744271
Nombre de pages : 200
Prix : 16 €