Aqua Incognita
« -Bonjour, c’est bien vous qui m’avez contactée ?
-Tout à fait.
-Alors dites-moi ce qui s’est passé avec mon père ?
-Rien du tout.
-Attendez, vous m’avez fait revenir ici pour quoi, alors ?
– Qui me dit que vous êtes Mona ? Monsieur Fauconnier m’a toujours dit que sa fille était brune.
-On change vous savez, et puis mon père ne m’a pas vue depuis sept ans ! »
Le jour du printemps est le jour de l’espoir, l’espoir d’une renaissance, quand la nature refleurit, les jours rallongent conséquemment et les températures s’élèvent. Pour Mona Fauconnier, cette année, c’est aussi le jour où elle apprend la disparition de son père Serge. C’est pour ça qu’elle rentre à Paris. Elle est attendue dans l’appartement de cet homme qu’elle n’a pas vu depuis sept ans, depuis la mort de sa mère. Celui-ci est un scientifique, chercheur parcourant le monde. Il est paléontologue très exactement. Ça fait un mois qu’il aurait dû être rentré. La gardienne de l’immeuble lui ouvre les lieux. Elle n’y rentre que pour nourrir Viktor, un magnifique ara bleu, qui semble inquiet de ne pas avoir de nouvelles de son maître. A-t-il vu quelque chose avant son départ ?
Mona prévient les autorités de la disparition de son père, puis débute ses recherches en commençant par l’ordinateur du paternel. Elle tombe alors sur un dossier nommé Octopolis, mais celui-ci est protégé par un mot de passe. Pas question de dormir là. Le soir tombant, Mona décide de regagner son pied à terre parisien, le studio photo d’Evi, une copine, actuellement en déplacement à Oslo. Le lendemain, rendez-vous au Muséum où travaille son père pour y rencontrer Laure Caplan, qui travaillait avec lui sur un projet appelé Octopolis, autour des 500 millions d’années d’évolution des céphalopodes. La chercheuse reste très évasive, plus préoccupée par la paléontologie que par la disparition de son collègue. De retour chez son père, Mona découvre que le perroquet n’est plus là et que la concierge tombée dans l’escalier, comme c’est étrange, est embarquée par le SAMU. Par un coup de bol miraculeux, Mona rallume l’ordinateur et trouve le mot de passe protégeant le dossier Octopolis, un essai sur l’évolution du vivant dans l’océan et l’intelligence des poulpes. Jusqu’où sera menée Mona sur les traces de son père, passionné de plongée sous-marine ?
Après Les grands cerfs, Gaétan Nocq signe un nouveau pavé bleuté, cette fois pas une adaptation mais un scénario original. La première partie de l’album alterne l’enquête de Mona avec des disgressions sous-marines sur les animaux multicellulaires qui évoluent sous l’eau. Le cténophore, l’anolamocaris et le trilobite, entre autres, dévoilent leurs secrets. L’évolution des céphalopodes est aussi à l’ordre du jour. Dans une deuxième partie, suite à l’invitation d’un plongeur, on va pénétrer dans les fonds marins méditerranéens avec Mona, d’abord avec des bouteilles en Méditerranée, ensuite dans un petit bathyscaphe, dans l’océan Pacifique de Clipperton.
Le bleu Nocq laisse parfois place à d’autres couleurs, souvent pastels, parfois du noir quand on descend dans les abysses. Ces tons correspondent également aux émotions, qu’elles soient aquatiques ou familiales. Si le décor marin, scientifique tant dans la flore que dans la faune, est finement représenté, le récit est avant tout une histoire d’héritage, celui laissé par des parents qui ont forgé une enfant, celui laissé par des générations pour des générations futures. Ce n’est pas un hasard si l’on va passer par la grande galerie de l’évolution du Museum d’Histoire Naturelle. Sans jamais donner de leçons, Gaétan Nocq livre un album écologique engagé, tout en finesse et poésie, un moment suspendu dans notre monde excité.
Gaétan Nocq n’est pas loin d’être un lanceur d’alertes. Octopolis est une fable qui subjugue par sa beauté tout en portant à réflexion sur la préservation des océans…et des rapports familiaux.
One shot : Octopolis
Genre : Emotion
Scénario, Dessins & Couleurs : Gaétan Nocq
Éditeur : Daniel Maghen
ISBN : 9782356741523
Nombre de pages : 280
Prix : 30 €