Musico Bruno !
« -Woooow. Nom de Dieu ! Ils vont venir faire un casting, ici ? Je le crois pas !
-Héhé.
-Et ça veut dire que la Valeria Guzzoli va vnir ici, avec ses nichons !? Rhaaa, je veuuux !
-Il faut absolument qu’on participe ! C’est une occasion en or, ça ne se reproduira pas. Il faut qu’on fasse ce casting avec le groupe ! »
« Samedi 24 août. Le casting de la plus célèbre émission musicale passe dans votre région ! Vous avez toujours rêvé de monter sur scène et d’époustoufler le public ? Vous voulez devenir la prochaine star qui vendra des millions de disques ? Venez tenter votre chance en participant à notre grand casting national en présence du célèbre jury de l’émission ! » Voici l’occasion rêvée pour Mimmo, 15 ans, de fuir le petit coin perdu d’Italie du Sud dans lequel il vit. Il ne veut pas vivre reclus. Il a de l’ambition. Il a de l’espoir. Il a une guitare. Un célèbre radio-crochet vient faire escale pour un casting. Il ne reste plus à Mimmo qu’à convaincre sa bande de copains de l’accompagner dans l’aventure. Il lui faut un groupe, il lui faut un chanteur, pour pouvoir participer au concours.
Attention, Maltempo n’est pas l’histoire d’un concours de chant… enfin, si…. enfin, non… Maltempo, c’est avant l’histoire d’un pays, l’Italie, en pleine mutation. Le bétonnage gagne les havres de paix et ce n’est pas du goût de tout le monde. Ce petit coin perdu est comme confiné. Certains habitants voudraient que ça le reste alors que d’autres souhaiteraient une ouverture au monde. La venue de l’équipe de casting est une porte qui s’ouvre vers un nouvel univers, vers celui que Mimmo rêve de conquérir. Il y a aussi un côté thriller avec Monsieur Stefano et l’humour n’est pas oublié grâce à Lupo. Alfred décuple l’intensité de l’histoire en utilisant le medium bande dessinée on ne peut plus efficacement. De doubles planches contemplatives invitent à se poser. Les moments déstructurés de répétitions musicales font entendre la guitare électrique. On n’avait jamais vu ça, on n’avait jamais lu ça comme ça.
Après Come prima et Senso, Maltempo est le troisième tome de la trilogie italienne d’Alfred. Ce n’était pas prévu au départ. L’auteur aux racines franco-italiennes a ressenti le besoin de poursuivre le voyage dans son Italie affective à l’issue de Come prima. N’ayant pas trouvé leur place dans cet album, certaines de ses notes ont nourri Senso. Les notes inutilisées de Senso ont de la même façon nourri Maltempo. Alfred réinvente des souvenirs d’enfance, dans des lieux authentiques, puisant dans sa mythologie familiale. Pour autant, nous sommes bien ici dans de la fiction et non dans de l’autobiographie. Ces trois albums sont indépendants, avec pour seul point commun le terreau affectif italien. C’est un passage de relais familial, entre la génération de ses parents et la sienne, entre lui et sa fille. Alfred y parle également de son amour pour la musique. L’histoire est musicale, elle est aussi théâtrale. Ce n’est pas pour rien que l’auteur participe et conçoit des concerts-dessinés depuis plus de vingt ans.
Alfred conclue donc une œuvre d’ambiance. Il n’a pour autant pas l’intention de quitter le pays qu’il nous annonce probablement retrouver dans un album plus autobiographique, à moins qu’il ne fasse avant un détour vers des univers plus éloignés. En attendant, profitons de cette escale hors du temps, hors du monde terrible d’aujourd’hui et de l’actualité terrifiquement anxiogène.
One shot : Maltempo
Genre : Comédie dramatique
Scénario, Dessins & Couleurs : Alfred
Éditeur : Delcourt
Collection : Mirages
ISBN : 9782413027782
Nombre de pages : 184
Prix : 23,95 €