La boucle est bouclée
« -A présent que nous ne devrons plus nous occuper de ton père, que vas-tu faire de nous, Nerio ?
-Mais rien, Sid. Tu restes ici avec ta maman, ta charmante épouse et ta jolie petite Chrissie. Et vous me gardez une chambre pour quand je viendrai passer un week-end de détente.
-Toi, un week-end de détente ? Ne me fait pas rire, « frérot ». »
Aux Etats-Unis, Thomas Winch vient de décéder. Nerio, son fils, n’assiste pas aux obsèques. Il est à Washington pour une histoire de puits de pétrole en Oklahoma dans une réserve indienne. Milan, le grand-père, avait été dépossédé de ses terres au profit des Cherokees chassés de Géorgie. Nerio a entamé une procédure de restitution. Il va gagner. Ça sera le début de son ascension. Plus rien ne va arrêter celui qui sera à la tête d’un des plus grands groupes financiers du monde. Ça, on le sait déjà. Il pourra toujours compter sur Sid, son frère de lait noir, pour le soutenir dans ses démarches… et ses magouilles. En Europe, au Montenegro, Jovan Winczlav est arrêté par la police politique de Tito. L’instituteur est accusé de propager des pensées contre-révolutionnaires à ses élèves. Sa femme Aliana parvient à s’échapper avec leur bébé Danitza, qui n’est autre que la future mère d’un petit Largo. Quels événements vont amener Nerio à adopter quelques années plus tard ? C’est ce que l’on apprendra dans cet album.
Jean Van Hamme et Philippe Berthet apportent une conclusion au triptyque prequel disant tout sur l’arbre généalogique de Largo Winch. Ses origines n’ont rien à envier à celles d’un célèbre amnésique. Van Hamme prend un plaisir non dissimulé à raconter la vie des ancêtres de l’aventurier milliardaire. Mais on le sent très à l’étroit dans ce triptyque. L’histoire aurait gagné à être étalée sur plus d’albums. En particulier dans celui-ci, ça va vite, très vite, trop vite. La vie de Danitza est décrite en accéléré. La bluette avec celui qui deviendra le père de Largo frise le cucul la praline. On aurait voulu plus de fond entre eux. C’est comme si Van Hamme riait de lui-même, de la façon dont il l’a fait dans le secret de l’Espadon. L’avantage, c’est que le scénariste applique son adage du « pas de temps mort ». Pour résumer, dans la forme, on est dans une bonne structure scénaristique. Dans le fond, l’auteur nous avait habitué à mieux.
La classe du dessin de Philippe Berthet relève le niveau. Son dessin très hollywoodienne (peut-être à cause ou grâce au privé de ses débuts) est la définition de la ligne claire réaliste. On espère d’ailleurs qu’après cet interlude « Largo » dans sa carrière on va le retrouver dans du polar noir américain. En attendant, cet album ravira ses afficionados, tant dans les scènes de dialogues où tension ou émotion sont amenées au premier plan par les regards, que dans des moments tragiques comme le bombardement de Sarajevo, qui est justement une des scènes beaucoup trop courtes de l’album. Coup de chapeau à sa collaboratrice
Bien que perfectible au niveau de l’histoire, avec La fortune des Winczlav, ce damné Van Hamme a encore une fois réussi son coup, en grande partie grâce au talent de Philippe Berthet. Ces aventures des ancêtres de Largo offrent de la véracité au parcours du milliardaire en jean qu’est Largo Winch.
Série : La fortune des Winczlav
Tome : 3 – Danitza 1965
Genre : Aventure historique
Scénario : Jean Van Hamme
Dessins : Philippe Berthet, avec la participation de Dominique David
Couleurs : Mado
Éditeur : Dupuis
ISBN : 9791034761074
Nombre de pages : 64
Prix : 16,95 €