Course-poursuite sous les Tropiques
« -Papa, j’ai faim !
-Je vais voir ce que fait maman, d’accord ? Margaux, vous pouvez garder Sofa ?
-Bien sûr ! Gabin, ma femme n’est pas redescendue ?
-Non, je ne l’ai pas vue, Monsieur. »
Hôtel Alamanda. Nous sommes en pleine après-midi à Saint-Gilles-les-Bains, sur l’Île de la Réunion. En ce vendredi 29 mars 2019, Liane Bellion quitte la piscine de l’établissement pour rejoindre sa chambre. Lorsque son mari Martial va voir ce qu’elle fabrique, laissant leur fille Sofa sous la surveillance d’amis, il trouve la porte fermée à clef. Il va chercher un double à la réception et découvre la chambre saccagée et des taches de sang. Liane a disparu. D’après les témoignages d’une femme de ménage, Martial serait monté une première fois avant. Le mari devient le suspect idéal. La Capitaine Eve-Marie Aja, la zarabe métissée créole, est sur l’enquête, aidée par Christos, un ancien gendarme de La Courneuve muté sur l’île depuis 30 ans. Entre fausses apparences et passé trouble, l’affaire Bellion ne va pas être simple à démêler.
Un petit séjour au soleil avec piscine, cocktails et farniente ? Ce n’est pas vraiment ce que propose Michel Bussi dans ce polar incroyable comme il sait si bien les ficeler. Très vite après la disparition de son épouse, Martial s’évade dans la nature réunionnaise avec sa fille. On ne sait pas si Liane est morte ou enlevée. Ce que l’on sait par contre, c’est que des cadavres viennent agrémenter l’enquête. On se doute que tout est lié. Évidemment, il serait trop facile que Martial Bellion soit un mari jaloux ou volage ayant zigouillé sa femme pour s’en débarrasser. L’histoire est si savamment construite que tout laisse penser qu’il en est l’instigateur. Les faits sont tellement intangibles qu’on voit mal comment le type n’est pas un salaud complet. Mais tu ne vas pas nous avoir si facilement, Michel Bussi ! Ha, ha ! Toujours est-il que ce récit est le genre de bouquins impossible à refermer avant la fin.
De nombreux romans de l’écrivain ont été adaptés en bande dessinée. Après Nymphéas noirs, c’est la deuxième fois que Stéphane Duval et Didier Cassegrain sont aux manettes d’une de ces transpositions. Duval s’empare savamment des romans de l’auteur pour en extraire la substantifique moëlle. Et ce n’est pas facile dans ces longues enquêtes policières aux multiples personnages. La particularité de Ne lâche pas la main est le décor bien sûr, cette magnifique Île de la Réunion, mais surtout la force des rôles secondaires comme Christo, expatrié qui connaît mieux l’île que bien des locaux, ou Imelda, la Miss Marple cafre, et toute la marmaille qui l’entoure. Cassegrain les campe en leur donnant toute la dimension nécessaire. Il dépeint également la Réunion de façon magistrale jusqu’à ses moindres recoins non fréquentés par les touristes, avec des couleurs qui donnent la température. Le Cap Méchant, la plage des Roches noires, le Cap Marianne, la route forestière du volcan, la plaine des Sables, l’immersion est totale.
Comme le western, le polar est un genre idéal pour la bande dessinée. Quand il s’agit d’une adaptation fort réussie comme celle-ci, si ça peut amener à la BD des lecteurs de romans, pour qu’ils se rendent compte de la plus-value qu’elle peut apporter, le pari est doublement gagné.
One shot : Ne lâche pas ma main
Genre : Thriller/Polar
Scénario : Fred Duval
D’après : Michel Bussi
Dessins & Couleurs : Didier Cassegrain
Éditeur : Dupuis
Collection : Aire Libre
ISBN : 9791034749850
Nombre de pages : 136
Prix : 29,95 €