Numa Sadoul et André Franquin, les entretiens de 1985
« -Mais dans quelle intention précise étais-tu allé à l’école Saint-Luc ?
–Aucune intention précise ; sauf celle de dessiner, c’était tout. C’était très vague et bien dans ma manière de ma personnalité toujours floue et nonchalante.
–Mais tu envisageais bien quand même de faire du dessin ton métier ?
-Je ne pensais pas aussi loin que ça, mais je suppose qu’en effet, je me voyais finir par gagner ma vie avec le dessin. »
« Tant de fois cité et jamais réédité ! » C’est par ces mots qu’Isabelle Franquin, la fille du maître, commence la préface de ce livre mythique d’entretiens de son père André Franquin, avec Numa Sadoul, l’un des plus grands exégètes de la BD franco-belge. Réalisés en 1985 et publiés l’année suivante, ils sont à nouveau enfin disponibles. Sadoul invite Franquin à détailler sa carrière, quarante ans après ses débuts. Après avoir publié un livre d’entretiens avec Hergé, Tintin et moi, en 1975, Numa Sadoul, ami de la famille Franquin, mit près de dix ans à convaincre le créateur du Marsupilami de se livrer à l’exercice. C’est grâce à l’épouse et à la fille du dessinateur qu’il y parvint enfin.
Première partie : André Franquin, des origines à 1985. Contrairement à de nombreux futurs dessinateurs dont les marges des cahiers d’écoliers étaient remplies de dessins, le petit André n’a jamais vraiment pratiqué avant de devenir professionnel. Il voulait pourtant le devenir, lisait beaucoup de bandes américaines, ainsi que Tintin. Il intégrera Saint-Luc. Dupuis lui proposera de reprendre Spirou après Jijé. La rencontre avec cet adulte (10 ans de plus que lui) qui n’était pas « dixit » un emmerdeur changera sa vie. Franquin parle de tout, n’élude aucun sujet. Numa Sadoul l’amène au plus profond de sa carrière avec tact, complicité et confiance.
Les parties suivantes sont chacune d’elles consacrées aux séries qu’il a dessinées. Album par album, Sadoul lui propose d’étudier et de commenter son œuvre, dans la chronologie. Les deux interlocuteurs commencent avec le premier Spirou pour finir avec la dernière Idée noire. Deuxième partie : Spirou (1946-1968). Franquin raconte son aventure avec le groom, du Tank et La maison préfabriquée à Panade à Champignac en passant par le mythique Nid des Marsupilamis, sa complicité avec Jidéhem, avec Roba, puis son avis sur les repreneurs. Troisième partie : Modeste et Pompon (1955-1959). Née de son arrivée au Lombard après sa brouille avec Dupuis, la série montre les talents de gagman hors pair de son auteur. Témoignage du quotidien d’une époque, Modeste et Pompon est un petit bijou ancré dans son temps. Quatrième partie : Gaston Lagaffe (1957-1996). Animation improbable et éphémère pour le journal Spirou, l’anti-héros sans emploi créé avec Delporte et Jidéhem deviendra l’un des personnages les plus mythiques de l’histoire de la bande dessinée. Une merveilleuse photo de Franquin assis sur un banc public à côté d’un parcmètre vaut son pesant de cacahouètes. Enfin, la cinquième et dernière partie : Petits monstres, Trombone, Idées noires, etc… revient sur tous ses autres travaux.
Ce livre indispensable est encore plus agréable à lire si l’on écoute en parallèle le podcast en six épisodes disponibles sur toutes les plateformes : Franquin par Franquin, qui reprend les meilleurs passages de ces entretiens.
One shot : Et Franquin créa la gaffe
Genre : Entretiens
Auteur : Numa Sadoul
Éditeur : Glénat
ISBN : 9782344053379
Nombre de pages : 432
Prix : 39 €