Une sœur, un frère, la guerre…
« -Rassure-toi… Je ferai tout mon possible pour le retrouver. Ce n’est pas de ta faute, tu m’entends ?
-Mais si seulement j’avais…
-Ce n’est pas de ta faute, Anna.
-Merci. Andrej… Fais attention à toi… »
Pologne, automne 1941. Anna, une jeune fille, rédige une lettre pour son frère Dorian : « Rejoins-moi sur l’île. Ce soir, à 22h. Je t’attendrai jusqu’au lever du soleil. Ta sœur qui t’aime, Anna. » Elle la cachète et l’entoure d’un ruban rouge. Elle sort à vélo et la confie à Andrej, un homme qui la rassure. Il va essayer de retrouver l’enfant. Seize ans plus tard, Anna est une jeune femme. Elle compose sur son piano Les notes rouges, une œuvre musicale dont elle est l’autrice. Pour la première fois depuis si longtemps, elle retourne dans le village de son enfance, au théâtre, pour y jouer Les notes rouges. Depuis toutes ces années, elle lui écrit par l’intermédiaire d’Andrej, dans l’espoir qu’il réussisse à entrer en contact avec lui. Jamais Anna n’a eu de réponse. Est-il seulement toujours vivant ? Elle espère toujours un signe. Ce concert est l’occasion ou jamais…
Quelques années plus tôt, Anna et Dorian Kowalski sont deux orphelins en pleine Pologne occupée par les nazis. Alors que les enfants sont sortis du dortoir de l’établissement qui les a recueillis pour jouer du piano dans un auditorium, ils sont surpris par le bruit des bottes. Anna parvient à s’enfuir, croyant que son frère la suivait. C’est la dernière fois qu’elle devait le voir. Anna sera plus tard adoptée par une famille française de musiciens. Elle ne cessera jamais d’essayer de retrouver son frère. Elle ne laissera jamais la place à l’oubli, gravant en elle le visage de son frère.
Sept chapitres, chacun portant le nom d’un type de composition musicale, composent cet album. Un prélude, une ouverture, une nocturne, une fugue, une marche et un impromptu enveloppent ce récit poignant. Les notes rouges est une histoire interrompue entre un frère et une sœur. On suit Anna dans sa route de Paris à cette ville de Pologne dont le nom commence par L., certainement Lublin, partiellement détruite par l’armée allemande en 1939. Les flashbacks racontent sa vie, son enfance, son adoption, et surtout la séparation avec son frère et le mystère l’entourant, au travers de lettres qu’elle a écrites pour lui. L’autrice Nadia Nakhlé offre à l’histoire un écrin somptueux dans des tons différents selon l’époque ou le narrateur concernés. Hormis le temps présent, les scènes sont en bichromies. Des hachures grattées retranscrivent les moments les plus douloureux. La musique jouée sur les touches du piano accompagnent la lecture de l’album. Si l’on ne peut que regretter de ne pouvoir entendre celle composée pour l’album par Stéphanie Verissimo (un QR code pour y accéder aurait été bienvenu), il est toujours possible de se rabattre sur la délicate Nocturne de Chopin en si bémol mineur, pour accompagner la lecture de cet album majeur.
De tous les albums dont la toile de fond est la seconde guerre mondiale, Les notes rouge est l’un des plus lyriques. Le mystère est tenu jusqu’au bout. Cerise sur le gâteau, la couverture ne pouvait pas être plus réussie.
One shot : Les notes rouges
Genre : Drame historique
Scénario, Dessins & Couleurs : Nadia Nakhlé
Éditeur : Delcourt
Collection : Mirages
ISBN : 9782413048190
Nombre de pages : 208
Prix : 27,95 €