Un chat dans un jeu de quilles
« -Non, mais regarde-moi ça, si c’est pas triste !
-Il y en a qui n’ont vraiment aucune dignité…
-Hé ho ! Tout va bien, Monsieur ?
-Holà, on a affaire à un naturel !
-Plutôt à un poltron. C’est bien la première fois que je vois un félin nous craindre. »
Alors que ses maîtres préparaient leur départ de leur résidence de villégiature de vacances, Minet, le petit chat, est parti jouer, poursuivant un papillon. Au moment de partir, impossible de mettre la main sur Minet. Au grand dam de Romane, la gamine de la famille, ses parents décident de s’en aller sans le félin. Se retrouvant esseulée à son retour au foyer, la pauvre bête retourne s’endormir dans la forêt. Minet est réveillé au petit matin par deux animaux habillés : un lapin et un écureuil. Alors que Minet n’aspire qu’à retrouver Romane, ses deux hôtes lui proposent de l’amener au village pour voir Chat Pourri qui pourra peut-être l’aider. En ce lieu, quatre règles sont primordiales : on ne parle jamais des humains, ça pourrait les faire venir, on fait confiance à son instinct en toute situation, surtout si ça sent l’humain, le respect est obligatoire, l’agression est réprimandée et l’entraide récompensée, enfin, le cannibalisme est interdit. Minet saura-t-il s’y tenir ? Ses nouveaux amis, qui le surnomment Poltron Minet, l’aideront-ils à retrouver Romane ?
Entre Billy-the-cat et Balade au bout du monde, Poltron Minet se place au milieu de ce grand écart. On y retrouve la cruauté animale de la première version de Billy et le monde moyenâgeux parallèle de la balade. Minet va découvrir une nouvelle civilisation avec ses règles bien spécifiques. Le chaton y trouvera des alliés, mais aussi des personnes dont il devra se méfier. Comme dans toute bonne bande dessinée animalière, cette communauté cachée est un reflet de notre société humaine. Macherot l’a si bien raconté. Madd et Mayen s’emploient à marcher sur ses pas et s’en tirent avec brio.
Cédric Mayen invite Poltron Minet à prendre conscience d’une injustice qu’il va combattre. La société féodale a certains accents malsains. Le parallèle de Mayen va jusqu’aux odeurs les plus malsaines du XXème siècle, avec le sort réservé aux hérissons, semblable à celui des juifs à la fin des années 30, regardés comme des êtres néfastes et dangereux, avant d’être déportés quelques années plus tard, ou dans une autre mesure à celui des musulmans dans notre monde actuel. Végétarien et antispéciste, Mayen défend par ailleurs la cause animale, refusant qu’on voit les bêtes comme des réserves de viande. Le dessinateur autodidacte Madd livre de sublimes pages en couleurs directes, avec quelques cases impressionnantes comme celle où Minet mange dans une écuelle éclairée à contre-nuit par la lune.
Poltron Minet s’inscrit dans la catégorie de la bande dessinée animalière engagée. Parfaitement écrite, magnifiquement dessinée, la série démarre sur les chapeaux de roues. Avec plusieurs niveaux de lectures, on est dans du tout public très intelligent.
Série : Poltron Minet
Tome : 1 – La voie romane
Genre : Aventure animalière
Scénario : Cédric Mayen
Dessins & Couleurs : Madd
Éditeur : Dupuis
ISBN : 97910
Nombre de pages : 56
Prix : 14,50 €