Bienvenue au lycée de Casablanca
« -Où sont tes parents, mon petit ?
-Sont pas là.
-On dit « Ils ne sont pas là. »
-Et comment t’appelles-tu ?
-Mehdi Khatib.
-Et les dindons ?
-J’sais pas comment ils s’appellent.
-Je ne veux pas leur nom. Je veux savoir ce qu’ils font là.
-Sont pas à moi.
-Bon, revenons à nos moutons… Ah oui ! Khatib Mehdi ! Tu es interne en sixième. Bienvenue à Lyautey, jeune homme. Je suis M. Lombard, le directeur. »
Dernier samedi du mois d’août 1969, venu de Béni-Mellal, Mehdi Khatib arrive au lycée français Lyautey à Casablanca, avec sa petite valise et deux dindons. Issu de la campagne marocaine, au pied des montagnes de l’Atlas, il a obtenu une bourse pour entrer interne en 6ème. M. Lombard, le directeur, l’accueille avant de le diriger vers la lingerie pour que Madame Benarroch lui vérifie son trousseau. Pas franchement aimable, la dame. Monsieur Morel, le surveillant d’internat, est un peu plus cool, enfin, pour l’instant. Au réfectoire, Mehdi fait la connaissance des premiers élèves qui, comme lui, sont arrivés quelques jours avant la rentrée pour des questions de logistique. Au fil des heures, l’internat se remplit. Les cours vont commencer. C’est la rentrée scolaire.

Au milieu de petits français et de jeunes marocains de classes aisées, Mehdi va devoir se faire une place. Féru de littérature et d’autres lectures en tout genre, il va s’adapter à ce nouvel environnement dans lequel il se sent parfois comme un intrus. Alors que tous rentrent chez eux le week-end, lui, habitant trop loin, doit rester sur place. Mais le surveillant n’a pas l’intention de rester enfermé avec lui dans l’établissement. Alors, il l’emmène en ville. (Ça reste entre nous.) Le mercredi après-midi, il faut choisir une activité d’éveil. Mehdi se réfugie dans le théâtre. Finalement, entre les cours et l’internat, il trouve son rythme. Voici déjà venues les vacances de Toussaint. Que va faire la direction de lui ? Peut-être que la famille d’un de ses copains peut l’héberger. Ça lui évitera de rester seul au lycée.

Carbone adapte ici le roman de Fouad Laroui paru chez Julliard en 2010 basé sur les souvenirs de l’auteur. C’est ce dernier qui signe la préface de cette transposition en BD, préface où il en dévoile trop et qu’il aurait été préférable de lire plutôt en postface. C’est un détail, mais éviter de la lire avant, vous trouverez plus de plaisir et de surprise à la lecture de l’album. Ancienne enseignante, Carbone connaît bien le milieu scolaire. Même si c’est ici dans le secondaire, elle s’attache au point de vue de l’élève parmi ses pairs et dans un monde d’adultes pas toujours compréhensifs. Sous les couleurs chaudes d’Alessandra Alexakis, la dessinatrice italienne BeneDi adopte un semi-réalisme tendre. Elle donne toute l’émotion possible comme dans la scène aussi drôle qu’émouvante du retour éphémère au village pour un mariage, qui va être une réelle prise de conscience pour Mehdi.

Une année chez les français se déroule 14 ans après l’indépendance du Maroc. Le pays porte encore des traces de colonisation. Les gens comme Mehdi représentent l’avenir d’un pays encore en construction. Bienvenue en immersion en classe de 6ème pour un an de la vie du petit garçon venu du pied de l’Atlas.
One shot : Une année chez les français
Genre : Parcours de vie
Scénario : Carbone
D’après : Fouad Laroui
Dessins : BeneDi
Couleurs : Alessandra Alexakis
Éditeur : Steinkis
ISBN : 9782368467374
Nombre de pages : 136
Prix : 23 €



