Histoire du Manga et de ses magazines
« Les magazines de prépublication -ou mangashi- sont au cœur de l’industrie du manga ua Japon. Pourtnt, en France, ils sont totalement absents. Pas de Shônen Jump, de Ribon ou de Big Comic dans nos kiosques. Cette absence est d’autant plus étonnante que nous sommes le deuxième pays consommateur de mangas après le Japon et que le marché connaît une croissance fulgurante depuis 10 ans. Comment expliquer ce paradoxe ? Pourquoi ces magazines n’ont-ils jamais trouvé leur place en France ? »
Depuis une dizaine d’années, le marché du manga en France explose, avec des années exceptionnelles au moment du Covid et post-Covid. Depuis 2023, le marché est en baisse, comme tout le secteur du livre, mais il était prévisible que la situation se stabilise après un tel boom. La culture manga a envahi la France avec livres, figurines et animes. Pourtant, il existe un pan de cette culture qui demeure absente : le mangashi, ou magazine de prépublication. Etonnant pour le deuxième pays le plus gros consommateur de mangas après le Japon. En trois chapitres, Maxime Gendron analyse la situation en comparant la prépublication du manga au Japon et celle de la bande dessinée en France, avant de s’intéresser aux tentatives de prépublication du manga en France.

On remonte le temps aux origines mêmes du manga avec un bond d’une quinzaine de siècles en arrière avec des caricatures sur les murs des temples, puis viendront les rouleaux peints (emaki-mono) et les estampes (ukiyo-e), avant que la vague d’Hokusaï, premier à utiliser le terme manga, ne vienne provoquer un tsunami qui se ressent encore aujourd’hui. A la fin du XIXème siècle, la culture occidentale s’insuffle dans le pays grâce à des artistes ayant amené de nouveaux styles d’illustrations ainsi que leurs techniques. La presse se développe dès le tout début du siècle suivant. Kitazawa et Okamoto sont les innovateurs qui ouvrent la voie de ce qui sera plus tard le manga moderne. Dans la première moitié du XXème siècle, les publications se multiplient, avant que la seconde guerre mondiale ne vienne assombrir le paysage. Pas d’inquiétude, après le conflit, la presse reviendra en force. Dans les années 60, ce sera l’âge d’or des hebdomadaires avec notamment le Shônen Magazine. Shonen, shojo, seinen, le manga se catégorise au fil des ans. Otomo, Tezuka, Urasawa, et bien d’autres, les noms de ces mangakas résonnent aujourd’hui dans le monde entier. Maxime Gendron explique comment certains auteurs travaillent entourés d’assistants, avec les conséquences économiques que cela implique. On découvre ensuite comment le marché a dû se réinventer avec le virage du numérique et les nouvelles générations de lecteurs.

La deuxième partie du livre s’installe en occident, avec l’avant-gardiste suisse Rodolphe Töpffer qui, dans les années 1830, posa les jalons de ce que l’on appellera plus tard la bande dessinée. Pour ceux qui ne connaîtraient pas, ou mal, les origines du Neuvième Art, Maxime Gendron écrit une synthèse parfaite de tout ce qu’il faut retenir au fil de l’Histoire. Louis Forton, Alain Saint-Ogan, Hergé : les années 1920 sont déterminantes pour l’avenir du genre. 1934, le journal de Mickey. 1938, Spirou. 1944, Coq Hardi. 1946, le journal de Tintin. Dans les années 50, l’album cartonné se démocratise. Dans les années 60, c’est l’âge d’or. La BD dite adulte va ensuite trouver sa place avec Métal Hurlant et autres (A suivre). Plus tard, ce sera la crise avec l’agonie du système de prépublication. Gendron effectue un parallélisme entre manga et BD franco-belge, entre points communs et divergences quant à leur historique.

C’est ainsi qu’on arrive au troisième chapitre de l’essai : la prépublication du manga en France. C’est en cela que l’ouvrage se démarque de tout ce qui a pu être écrit avant, et où l’on comprend le pourquoi du comment de l’état des lieux aujourd’hui. C’est de 1969 que date la première tentative de prépublication dans les pages du magazine Budo. C’est en 1978 que naît la première revue entièrement dédiée au manga : Le cri qui tue. En 1983, les Humanoïdes Associés et Artefact tenteront sans succès l’édition d’albums. Après la vague anime à la télévision dans les années 80, il faudra attendre 1990 pour que Jacques Glénat lance réellement le manga en France avec Akira, puis Dragon Ball. Tonkam lui emboîte le pas avec les œuvres d’Osamu Tezuka. Viendront ensuite les tentations et les tentatives de lancement de périodiques : des échecs. Gendron les énumère et en analyse les causes, avec notamment le scantrad. Fin 2024, quatre éditeurs européens, dont Kana en France, lancent le trimestriel Manga Issho, avec des prépublications de mangas de leurs pays. Sera-ce enfin notre magazine vedette ?
Des annexes chiffrées bouclent le livre qui ne saurait être complet sans son complément en couleurs Le guide des magazines de prépublication, qui les recense en citant les séries que l’on y retrouve.

Tout, tout, tout, vous saurez tout sur l’histoire de la prépublication du manga grâce à Mangashi. Maxime Gendron, qui a l’habitude de transmettre sa passion dans des conférences, écrit un ouvrage historique et économique axé sur le présent, basé sur le passé et projeté vers le futur. Très instructif, passionnant même pour les non-initiés, et, contrairement à de nombreux ouvrages issus de travaux d’études, le livre se lit avec fluidité. Manga-issime.
Titre : Mangashi Histoire de la prépublication du Manga
Genre : Ouvrage d’étude
Auteur : Maxime Gendron
Couverture : L’atelier de Kriss
Éditeur : Bulma éditions
ISBN : 9791097618117
Nombre de pages : 312
Prix : 22 €



