Secret défense
« -Bonsoir, Albert.
-Bonsoir, Pacôme. J’ai apporté des gâteaux pour le thé. Tu as remarqué tous ces étudiants et ces professeurs qui disparaissent de Princeton du jour au lendemain ?
-Oui. C’est troublant, en effet.
-On dirait que tous les cerveaux de ce pays sont appelés ailleurs. Mais où ? Mystère ! »
New Jersey, USA, septembre 1943. Champignac et Blair se promènent dans le parc de l’Université de Princeton. Les observateurs prennent le scientifique pour un barjo. Et pour cause, il discute tout seul… avec un fantôme. Blair est morte mais son compagnon ne l’accepte pas… Ou alors il a la chance de l’entendre, de la voir, qu’elle l’accompagne. En fin d’après-midi, à la maison, on toque à la porte. C’est Albert Einstein en personne qui vient rendre visite à Pacôme, avec des gâteaux pour le thé. Il vient discuter de la mystérieuse disparition d’étudiants et de professeurs à Princeton, comme si tous les cerveaux du pays étaient appelés ailleurs. Le FBI se méfie d’Einstein. Son directeur, Hoover, est persuadé qu’il complote avec les communistes contre les Etats-Unis. Pour Champignac, son homologue est quelqu’un de bien : pacifiste, humaniste, antifasciste et antimilitariste. Ce qui va encore moins plaire à Hoover, c’est quand Champignac va lui apprendre avoir découvert que les disparus seraient partis pour une mission ou un travail en lien avec la guerre au Nouveau-Mexique, un travail « atomique ».

C’est un Pacôme désabusé par la vie que l’on découvre en ce début d’album. Il se raccroche au fantôme de Blair. Fantôme ? Einstein dit lui-même que l’énergie ne peut pas mourir. Elle circule, se transforme et ne s’arrête jamais. C’est une vie après la mort. Bref, l’espionnage des savants disparus de Princeton va amener Champignac dans une « chasse aux sorcières » jusqu’à Los Alamos au Nouveau-Mexique, au cœur de la genèse de la bombe A.
La relation entre Champignac et Blair est ouvertement un écho à l’histoire d’Orphée et d’Eurydice. Orphée est allé jusqu’aux enfers pour tenter de sauver l’amour de sa vie, mais il va commettre une erreur qui va l’empêcher de la ramener.

Les personnages historiques sont légion dans cet épisode. Albert Einstein vient en premier lieu rendre visite à Champignac. Ce dernier travaille pour le FBI dirigé par Edgar Hoover. Robert Oppenheimer dirige le centre de Los Alamos, où travaille Richard Feynman. On va également croiser un autre personnage historique, mais dans l’histoire de Spirou, à savoir le professeur Sptschk, que l’on verra dans Le voyageur du Mesozoïque, et plus tard mais avant dans Panique en Atlantique. Les BeKa proposent ainsi un scénario malin puisant tout autant dans les sources historiques de l’humanité que dans celles historiques du Spirouverse.
Même s’il n’essayait pas de copier le style Rosinski dans son Thorgal Saga, David Etien est quand même plus à l’aise ici. A la manière dont Munuera s’est approprié Zorglub pour en faire un personnage bien à lui, il s’accapare Champignac comme si c’était lui qui lui avait donné naissance dès le début.

Les années ne sont pas noires que pour Champignac. On avance avec lui dans la marche du monde… qui va bien de travers. Et ce ne sera que le début… Poignant, dramatique, émouvant, et parfois drôle aussi, les auteurs crédibilisent avec classe un personnage emblématique créé par l’immense André Franquin.
Série : Champignac
Tome : 4 – Les années noires
Genre : Aventure
Scénario : Beka
Dessins & Couleurs : David Etien
Éditeur : Dupuis
ISBN : 9782808510271
Nombre de pages : 56
Prix : 15,95 €