Quand le mythe laisse place à la réalité
« -Et voilàààà.
-Voilà quoi ?
-Eh bien, je suis reine.
-Ah, et ils sont où, tes insignes du pouvoir ? Ta couronne d’Hathor ?
-Euh, il n’y a pas de couronne d’Hathor. Mais je suis coiffée en reine, là. Je porte le diadème, le ruban de commandement, tu vois bien ! C’est sobre.
-C’est affreusement minimaliste, oui ! Tu as l’air d’une intendante sévère. On est loin des fastes de mon époque, tiens. Mais bon.Te voilà prête pour te jeter dans la fosse aux lions. »
Sur les bords du Nil, à Alexandrie, de nos jours, alors que l’aube commence à poindre, un petit singe explique au fantôme de Cléopâtre comment le monde qu’elle a connu a disparu. Si son nom est célèbre pour avoir été la femme ensorcelante qui a séduit les maîtres de Rome et que son nez est passé à la postérité, elle revendique avoir tenu l’Empire romain en respect et savoir parler dix langues. C’était il y a vingt siècles. Le soleil va se lever. Il est temps de rentrer rejoindre Alexandre, Marc Antoine et tous les Ptolémées. Cléopâtre va en profiter pour raconter son histoire au singe, une histoire qui n’a rien à voir avec la légende.

Cléopâtre commence par son enfance parmi le peuple alexandrin. Elle est douée pour les études. Alors qu’elle s’aventure dans une salle emplie de trésors, elle assiste à un meurtre fomenté par son père, accusant l’un de ses collaborateurs de vol. Pour la réconforter, sa majesté propose à sa fille de choisir un cadeau. Elle jette son dévolu sur la momie d’un vieux roi, un certain Khéops. Elle lui offre une demeure dans les catacombes de la ville. Ce sera son confident. Quelques jours plus tard, Cléopâtre accompagne son père pour une visite diplomatique dans la vallée du Nil. Elle pourra voir les pyramides. Le temps de l’insouciance ne durera pas longtemps. Son père devra s’enfuir. Sa sœur aînée sera portée au pouvoir. Quelques années plus tard, c’est elle qui partagera le trône d’Egypte avec son frère Ptolémée Dionysos.

Isabelle Dethan retrace la destinée complète de la dernière reine d’Egypte, dont la vie était un véritable péplum. L’autrice tort le coup à tous les instants de légende, notamment pour terminer celui de la mort de la souveraine. Grâce à des recherches approfondies, Dethan s’est rendue compte que sa réputation de femme fatale était réductrice. Elle a tenu tête face à Rome, sauvant son pays en commettant des actes répréhensibles. Cléopâtre était avant tout une femme de pouvoir. Dethan montre les différences culturelles entre les alexandrins et les égyptiens, jugés barbares par leurs voisins. On verra Cléopâtre au pieds de César, avant de mettre Marc Antoine à sa botte. La Reine était une femme puissante. Isabelle Dethan dresse un portrait réaliste et jamais vu d’une femme qui a grandement influé sur le cours de l’Histoire.

Qui mieux qu’Isabelle Dethan aurait pu dresser un portrait aussi précis, aussi fin et montrant la force féminine de Cléopâtre ? La spécialiste de l’Egypte en bande dessinée signe un biopic réaliste, avec juste la pointe d’onirisme qu’il faut pour accentuer l’immersion dans une Antiquité que l’on croyait connaître.
One shot : Moi, Cléopâtre, dernière reine d’Egypte
Genre : Biopic
Scénario, Dessins & Couleurs : Isabelle Dethan
Éditeur : Dargaud
ISBN : 9782505120841
Nombre de pages : 208
Prix : 26,95 €