Amours présidentielles
« -Et ça, c’est quoi ? Tu n’es pas capable de tenir ta femme ?! Ça ne serait jamais arrivé à ton frère ! Il a la classe, lui. Il sait se faire respecter des femmes. En plus, il a une bonne place dans l’industrie ! C’est quelqu’un d’important !
-Oui, enfin, moi aussi, je…
-Toi, tu n’es pas sûr de le garder, ton travail, parti comme c’st. Alors trouve-toi vite une épouse s’il te plaît. Ne me fais pas honte, c’est tout ce que je te demande. »
En déplacement dans le quartier des Murneaux, le président Thierry Langlois a poursuivi et corrigé un jeune banlieusard qui l’avait insulté. C’est totalement inédit sous la Vème République, et ça sème la discorde à l’Elysée. Si pour certains, la réaction donne à la présidence une image virile et volontariste, avec un chef de l’Etat courageux qui va au charbon et ne redoute pas le contact avec le public, pour le secrétaire général de l’Elysée, ami de trente ans du Président, à un an du renouvellement du mandat, l’image renvoyée est catastrophique. Langlois venait de montrer qu’il était incapable de maîtriser ses nerfs. Pendant ce temps, l’ex-épouse du premier homme du pays s’apprête à publier ses mémoires, un brûlot qui risque de faire du bruit, sans compter qu’elle s’affiche en musclée compagnie en couverture de journaux à scandale.

L’Elysée va devoir préparer sa défense. C’est Xavier de Fursac, grand communicant du Faubourg Saint-Honoré, qui échafaude une stratégie. En devenant la nouvelle Première Dame, Amandine Gélinac, ancienne Miss France égérie d’une marque de parfum, va effacer la précédente, replacer sur le président toutes les valeurs du désir et le réconcilier avec la Nation. Ce dernier n’est pas convaincu, mais lorsque sa mère va lui intimer l’ordre de redorer son blason, le « petit garçon de sa maman » va devoir se faire à l’idée. Contre toute attente, une autre femme va se mettre sur la route du président : Victoria Coraly, actrice qui vient de recevoir un prix. Elle est instable, colérique, profondément rebelle à toutes les conventions. L’entourage du chef d’Etat lui déconseille d’entrer en relations poussées avec elle. Langlois va évidemment faire le contraire.

Didier Tronchet offre à Jean-Philippe Peyraud le scénario d’une comédie dramatique pas si éloignée que ça de la réalité. Première Dame joue dans la même catégorie que Quai d’Orsay. Ça joue de la politique avec humour et ironie. Thierry Langlois a la suffisance et la prétention d’Emmanuel Macron. Il a le bling-bling de Nicolas Sarkozy et la maladresse de François Hollande. Tronchet a synthétisé les trois derniers présidents de la République française dans ce type dégingandé. Victoria Coraly joue le rôle du chien dans un jeu de quilles. Elle va tenter de désarçonner le pouvoir avec ses convictions et son franc parler, en gardant toujours son indépendance. Dans Première Dame, il est question d’intégration, de migrants, de luttes pour le pouvoir, de coups fourrés et de savonnage de planche. Victoria réussira-t-elle à faire ouvrir les yeux à Thierry ?
Aux dessins, Jean-Philippe Peyraud donne du dynamisme et de la rapidité à l’histoire. Les couleurs en différents tons duos font partie intégrante de l’œuvre. Sous une couverture laissant méditer sur la valeur de la République et le patriotisme, Peyraud donne une exceptionnelle leçon de colorisation, la plus belle depuis bien longtemps.

Première Dame est une comédie dramatique qui réunit tous les genres de récit. Tronchet signe un scénario impeccable, dessiné par un Peyraud hors pair. Il paraît même qu’un film est déjà en développement.
One shot : Première dame
Genre : Comédie
Scénario : Didier Tronchet
Dessins & Couleurs : Jean-Philippe Peyraud
Éditeur : Glénat
Collection : 1000 feuilles
Nombre de pages : 272
Prix : 25 €
ISBN : 9782344052280