Un néerlandais au pays du soleil levant
« -Que diriez-vous d’une tasse de thé ?
-Oh, avec grand plaisir !
-Etes-vous un prêtre ?
-Euh… En fait, non… »
Frenk est parti au Japon pour s’initier au bouddhisme. Entre apprentissage au zen et souvenirs de son enfance et adolescence, il prend conscience du tournant que prend sa vie en adoptant cette nouvelle philosophie. Les moines zen qui méditent ne bougent pas. Ils restent assis, immobiles, pour voir plus que ce que l’on nous a appris à voir. C’est ça que l’on appelle la lévitation. Porter des vêtements amples. Poser ses fesses sur le sol. S’asseoir en tailleur, le dos bien droit. Imaginer qu’on est soulevé doucement par un cheveu du crâne. Former un petit bol avec les mains. Ça y est, on est prêt. Les pensées parasites arrivent, c’est normal. Un jour, un beau jour, l’esprit cessera de divaguer. C’est ça, méditer. Frenk se mue en guide, guide spirituel, mais aussi guide bel et bien physique : les arts martiaux, les bentos, le thé, la pêche avec des cormorans, un séisme, la calligraphie. On est là-bas, avec lui.

Si Frenk suit cette voie, ce n’est pas un hasard. A travers les flashbacks, il remonte le temps pour comprendre et faire comprendre au lecteur ce qui l’a amené, ce qui l’a guidé, jusqu’à cet abordage du zen. Tout commence à l’adolescence avec la découverte et la lecture dans la bibliothèque de son père des Jardins du zen, un essai sur le bouddhisme zen par Bert Schierbeek et cette question, une parmi tant d’autres, soulevée par l’auteur : Quel est le bruit d’une main qui applaudit seule ? Et puis, il y eut la rencontre avec la mort, d’abord celle de Panthère, la chatte noire de la maison et le rituel de son inhumation, puis celle d’un camarade de classe qu’il n’aimait pas particulièrement. Un jour, Frenk se fait raser la tête. Il ne savait pas encore qu’il se débarrassait de son ancien moi et disait adieu à son individualité physique.

Cet album se mérite. Il faut quelques pages pour en comprendre le sens et en adopter le rythme. L’auteur néerlandais Frenk Meeuwsen partage son expérience de découverte de la philosophie orientale au Japon dans les années 90. Il a vécu à Kyoto, la ville des temples. Deuxième album publié chez Anspach après Année Zéro, Zen sans maître est en fait le premier qu’il a réalisé. A la base en noir et blanc, il a été colorisé à l’occasion de cette traduction en français, en deux tons, bleutés pour le passé au Pays-Bas, ocre pour le présent au Japon. Il compile cinquante-cinq instants de vie, comme des haïkus, pour une immersion introspective. On va croiser des personnages étonnants, comme Alain, un dandy philosophe hors du temps. Le livre est drôle, parfois, émouvant, souvent, et surtout, ça aide à comprendre le sens de la vie. L’auteur a trouvé le sens de la sienne. Avec générosité, il montre le chemin à qui voudrait le suivre.

Avec un titre qui sonne comme un jeu de mots, 500 mètres, Zen sans maître, Frenk Meeuwsen nous invite à une course au sens de la vie dont il est un guide inestimable. Ceux qui n’ont jamais compris le principe de la méditation vont enfin en concevoir le but.
Titre : Zen sans maître
Genre : Philosophie
Scénario, Dessins & Couleurs : Frenk Meeuwsen
Éditeur : Anspach
ISBN : 9782931105382
Nombre de pages : 288
Prix : 32 €