Dans les entrailles de l’enfer
« -Où est-ce que vous amenez ce paquet-là ?
-Brigade spéciale.
-Deuxième étage, salle 35.
-Ne vous donnez pas cette peine, je m’en charge.
-?!
-Commissaire divisionnaire Fernand David, chef des Brigades Spéciales. Racontez-moi ce que je dois savoir sur cette souris. Alors ma petite Madeleine, on passe ses dimanches à tuer des allemands ? »
Paris, juillet 1944. Madeleine Riffaud vient d’être arrêtée par un chef de la milice de Versailles après avoir abattu un Haupsturmführer sur le pont de Solférino. Elle est conduite à la préfecture de police de Paris sur l’île de la Cité afin d’y être interrogée, moyennant quelques tortures. Appliquant les préceptes de la brochure clandestine « Comment se défendre », du Colonel Fabien, elle se persuade par un auto-lavage de cerveau qu’elle ne sait rien. Une perquisition à son domicile n’en apprendra pas plus à ses bourreaux. Ni les coups assenés sur elle-même, ni les décharges électriques, ni la tête immergée dans un lavabo, ni même les horreurs perpétrées sur des détenus devant ses yeux ne la feront déroger à la règle. Madeleine reste muette. Pendant ce temps, au comité d’aide, les Forces Françaises de l’Intérieur (FFI) organisent la rébellion.
C’est en travaillant avec David Evrard sur Irena, infirmière qui sauva des milliers d’enfants juifs du ghetto de Varsovie, que le scénariste Jean-David Morvan décida de contacter une résistante dont il était question dans un documentaire télévisée : une certaine Madeleine Riffaud. Leur rencontre dégagea immédiatement l’énergie créatrice et le devoir de mémoire qui allait donner lieu à cette série mettant en avant ses actions d’éclat. Si tout est strictement exact dans le témoignage, Madeleine étant très pointilleuse et rigoureuse, une marge de manœuvre permit quand même aux auteurs de regrouper ou couper certains événements pour que la structure du récit tienne la route. L’héroïne, car s’il est un terme qui n’est pas exagéré pour la qualifier, c’est bien celui-ci, a raconté à l’auteur ses souvenirs en dialogues, théâtralisant les rôles de chacun des protagonistes. La plupart des récitatifs et des dialogues sont signés Madeleine, Jean-David se chargeant des ponts.
Dominique Bertail profite de l’époque qui s’approche de la libération de Paris pour s’emparer de toute la documentation existante afin de coller au plus près à la réalité, mais aussi aux exigences des pinailleurs qui ne pardonnent aucune erreur. Les représentations ne sont cependant jamais photographiques. Bertail travaille d’après sa mémoire de l’époque insufflant ainsi de la vie et de la spontanéité. Pour chacun des personnages rencontrés, le dessinateur a demandé à Madeleine des détails et des sensations afin de mieux les cerner pour mieux les croquer. Concernant Madeleine elle-même, Dominique l’a faite évoluer, l’a rendu plus adulte et aussi marquée par la tragédie.
Ce troisième tome de Madeleine, Résistante a une saveur spéciale. Quelques jours après son centième anniversaire, Madeleine Riffaud nous a quitté. Mais grâce à cette œuvre magistrale signée Jean-David Morvan et Dominique Bertail à laquelle elle a activement participé, elle ne partira jamais complètement.
Série : Madeleine, Résistante
Tome : 3 – Les nouilles à la tomate
Genre : Biopic
Scénario : Jean-David Morvan & Madeleine Riffaud
Dessins & Couleurs : Dominique Bertail
Éditeur : Dupuis
Collection : Aire Libre
ISBN : 9791034759668
Nombre de pages : 128
Prix : 23,50 €