Derniers sabotages et premiers arrivages
« -Bien le bonjour, jeune homme !
-Heu… Bonjour ! Je peux vous aider ?
-Certainement. Je connais encore peu mes administrés, et pour les servir au mieux, j’aimerais vérifier les rationnements, les besoins de chacun à Saint-Cénéri… Pour cela, il va me falloir votre livre de comptes.
-Il faudra que je demande à mon père. Sinon, vous voulez quoi ? Y a des clients qui attendent. »
Dans la boucherie du village, le nouveau Maire de Saint-Cénéri vient s’assurer du bon fonctionnement des rationnements, pour le bien de ses administrés bien sûr. François le reçoit froidement, répondant à l’édile qu’il allait demander plus tard le livre de comptes à son père. Il faut dire que le nouvel élu est un collabo à la solde de l’envahisseur. Pendant ce temps-là, à Londres, Edmond travaille aux transmissions pour les services secrets britanniques, en attendant l’espoir de voir ses parents libérés des camps de prisonniers. Nous sommes en Mai 1944, l’opération Fortitude se met en place, visant à faire croire aux allemands que le débarquement serait organisé ailleurs qu’en Normandie.
En France, dans le maquis, la résistance prépare des opérations de sabotage. Dans les troupes ennemies, il n’y a cependant pas que des allemands. Il y a aussi des français, des alsaciens, comme Karl. On les appelle des « Malgré-nous » parce qu’ils ont été enrôlés de force. Karl, justement, ne supporte plus l’uniforme boche, déserte et vole des habits civils. C’est à l’hôpital d’Alençon qu’il va rencontrer Anne et que les jeunes gens vont se rapprocher. Mais l’heure n’est pas à la bluette. A Plouzané, au large de Brest, les premiers parachutistes alliés arrivent d’Angleterre. Alors que le sable d’Omaha Beach n’a pas encore été foulé, Edmond découvre dans un document les horreurs qui sont perpétrées à Auschwitz.
Il se passe tellement de choses dans ce neuvième tome du Réseau Papillon qu’on a l’impression de le lire en un clin d’œil. La tension est à son comble. Le débarquement n’a pas encore débuté. Le suspense est déjà insoutenable. C’est ça qui est scénaristiquement incroyable. Nous sommes dans une histoire dont on connaît tous le déroulement et la fin, et pourtant on tremble, on se demande si tout va se passer comme prévu. Là est toute la force d’un scénariste. Franck Dumanche, avec son complice Michel-Yves Schmitt (qu’il serait enfin temps de créditer sur la couverture), avance ses pions de manière stratégique. Et ce n’est pas évident. Nous ne sommes plus dans les premiers tomes où les copains du réseau étaient ensemble. La troupe est disséminée. Il faut jongler de personnages à d’autres, sans en oublier un pendant trop longtemps, sans perdre le lecteur et en gardant une cohérence temporelle.
On ne sort pas indemne d’un album comme La cellule qui racontait la préparation des attentats du 13 novembre. Ici, au dessin, on remarque de plus en plus que Nicolas Otéro intègre sa patte réaliste, subrepticement, dans quelques cases, comme si les lecteurs grandissaient et devenaient adultes avec la série. La chrysalide devient papillon, devient réseau papillon. Il serait curieux de revisiter totalement la série dans ce prisme complètement réaliste.
Le réseau Papillon est une aventure humaine, une œuvre de mémoire et un outil pédagogique. Après La guerre des Lulus et Les enfants de la résistance, pourquoi Gaston et ses camarades n’auraient-ils pas droit à l’adaptation cinématographique de leurs péripéties ?
Série : Le réseau Papillon
Tome : 9 – L’aube du débarquement
Genre : Aventure historique
Dessins : Nicolas Otéro
Scénario : Franck Dumanche & Michel-Yves Schmitt
Couleurs : 1ver2anes
Éditeur : Jungle
ISBN : 9782822244756
Nombre de pages : 56
Prix : 12,95 €