Musique interdite !
« -Tu as vu ce que fait Nina dans son hangar ?
-Bien sûr, Anton. C’est un ouvrage magnifique. Ne pars pas.
-Et elle l’aura bientôt fini ?
-Elle passe la laque aujourd’hui. C’est la dernière étape.
-Eh bien je vais aller voir Nina. Je vais la convaincre de me confier ce chef-d’œuvre, et j’irai défier Sedah ! »
Anton réussira-t-il à s’enfuir dans les collines avec un piano à queue ? Le clandestin poids plume, recherché par tous les sbires des sœurs-juges, voudrait traverser les antres avec un instrument interdit de 150 kilos. Mais pourquoi donc Anton est-il clandestin ? Tout simplement parce qu’il est au royaume des morts… et qu’il n’est pas mort. Dans ce monde où la musique est totalement interdite, Nina Simone est en train de construire en secret un piano à queue. Si Anton parvient à en jouer devant Sedah, le grand régisseur des morts, ce dernier sera plongé en état hypnose. Anton pourrait ainsi lui demander de revenir dans le monde des vivants. C’est Quéa, la jeune sœur-juge fille de Sedah qui lui a suggéré de faire comme ça.
N’ayant aucun souvenir de sa vie d’avant, Anton est néanmoins persuadé qu’il est bel et bien vivant. Dans ce monde entre les mondes, cet entre-monde, ce monde des « antres », Anton est comme le ramoneur du Roi et l’Oiseau. Il court, il court. Il fuit tout autant qu’il poursuit. Si Les antres est une série sur la mort, c’est aussi une série sur la musique. L’art en général et la musique en particulier peut sauver un monde, quel qu’il soit, concret ou dans les limbes. Ce n’est pas pour rien si Frédéric Chopin et Nina Simone sont de la partie. On aperçoit même Régine, Prince, Michou, Dalida et… Geneviève de Fontenay, avant que les frères Montgolfier ne viennent tester leurs nucléon-moteurs.
Eric Puybaret a mis plus de deux ans à publier ce deuxième tome des Antres. Il faut dire que chaque planche, chaque case, est un tableau en soi. Ce n’est certainement pas un hasard si Anton croise aussi la route de Laïs de Corinthe, non pas parce que c’était une courtisane de la Grèce antique, mais parce qu’elle a été le sujet d’un portrait de Hans Holbein le Jeune. Il a adopté le style du sfumato, technique mise au point par Léonard de Vinci. Le sfumato donne des contours imprécis en jouant sur les textures. Les antres est une des rares bandes dessinées « sfumato ». Il n’y a aucun trait de contours. Les éléments de décors se fondent entre eux. Les personnages s’y intègrent avec délicatesse pour certains, avec horreur pour d’autres. Attention, voilà de méchantes créatures ailées !
Anton réussira-t-il à rejoindre le monde des vivants ? Sera-ce où il veut quand il veut ? Le cliffhanger final ne lui promet pas un avenir proche de tout repos. Notre souhait n’est pas qu’il ressuscite tout de suite, mais qu’Eric Puybaret ne nous fasse pas trop languir pour le retrouver. En attendant, rêvons dans sa mort, car si c’est vraiment comme le décrit l’auteur « de l’autre côté », on ne risque pas de s’ennuyer.
Série : Les Antres
Tome : 2 – Quéa
Genre : Fantastique
Scénario, Dessins & Couleurs : Eric Puybaret
Éditeur : Delcourt
Collection : Terres de légende
ISBN : 9782413049258
Nombre de pages : 56
Prix : 15,50 €