Une sirène assassinée
« -Madame… Excusez-nous les danois, nous avons un problème. Mais je vais t’occuper. Je suis très francophile. Ici, c’est comme ma maison parce que j’habite là. Je peux t’aider.
-On a vraiment trouvé une sirène morte ? C’est possible, ça ?
-Oui. Nous ne comprenons pas la chose encore. Toute la ville est dans le grand désarroi. Les gens ont la peur ! Ils ont le chagrin. Ils ont l’émotion qui déborde. »
Partie six jours au Danemark, à Copenhague, Nana Miller, parisienne, ne savait pas qu’elle allait y rester plus que prévu. Elle a quitté Paris sans prévenir son ado de fille. Elle lui a laissé cent balles, un post-it sur le frigo et un reste de lasagnes. Royal ! Arrivée sur place, dans le taxi qui la mène à l’hôtel, c’est la panique sur les boulevards. La radio annonce qu’un corps a été trouvé près d’Amalienborg. Ce n’est pas un homme. Ce n’est pas tout à fait une femme. C’est une sirène. Le personnel ayant déserté l’hôtel, Anna y est accueillie par Thyge Thygesen (prononcez Thüü Thüsen), un excentrique qui y habite en compagnie de « Nom d’un chien », son caniche rose. Le pays est verrouillé. Les aéroports sont fermés. Plus personne n’entre ni ne sort du Danemark. L’information est gardée secrète. Anna va devoir prendre son mal en patience. « Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? »
Anna ne va pas rester passive en attendant que la situation évolue. Thyge (prononcez Thüü) est animateur de radio. Il est présentateur de l’émission « Les vrais génies ont la parole », dans laquelle il prend au téléphone les seuls qui se posent les bonnes questions : les enfants. Ça ne va louper. Il y en a un qui l’appelle pour lui demander qui a tué la sirène, parce que les sirènes, elles ne meurent pas normalement. C’est comme dans les multivers Marvel : si une brèche s’ouvre sur un autre univers, tout est chamboulé. Il faut qu’un gardien de l’univers remette les choses en ordre. Thyge et Anna vont se transformer en détectives en herbe afin de démêler l’intrigue. Un gourou, un club de caniches, le célèbre parc d’attractions Tivoli en plein centre-ville, des terroristes, la capitale du Royaume du Danemark est le théâtre d’une affaire bien mystérieuse.
Après Sousbrouillard, le duo Anne-Caroline Pandolfo et Terkel Risbjerg est de retour avec une petite pépite, un pavé de suspens et d’émotion à côté duquel il est impossible de passer. Terkel Risbjerg enveloppe l’histoire dans un style proche de celui de Christophe Blain. On est tout de suite pris dans l’action, la problématique est posée dès les premières pages. Bien sûr, les liens entre Anna et Thyge vont évoluer au fil de l’histoire. L’ours fêlé qu’est le danois va se transformer en doux kidulte. La rigide française, dont on ne connaîtra jamais vraiment la raison du voyage, va être attendrie par le moustachu. Jusqu’à quel point ? On est dans une tragi-comédie où les scènes les plus cocasses (comme une réanimation de caniche après un séjour dans l’eau) côtoient des instants très sérieux (comme l’autopsie de la sirène). Anne-Caroline Pandolfo aborde le sujet des dérives sectaires et du terrorisme. On ne peut s’empêcher de penser aux attentats perpétrés à Copenhague en 2015. Ce livre n’en serait-il pas une version décalée ?
Cette histoire a l’air futile et fantaisiste, mais elle est très profonde. Un de plus beaux messages qui soit est délivré dans l’une des dernières scènes de l’album lors d’une conversation entre Thyge et l’un de ses jeunes auditeurs. Copenhague est ces bijoux grâce auxquels, contre toute attente, on n’est pas tout à fait le même après l’avoir lu. Faire de sa vie un rêve, faire de son rêve une réalité.
One shot : Copenhague
Genre : Polar feel good
Scénario : Anne-Caroline Pandolfo
Dessins & Couleurs : Terkel Risbjerg
Éditeur : Dargaud
ISBN : 9782505122159
Nombre de pages : 296
Prix : 29,99 €