Le Roi, sa fille et le Baron
« -De toute part, je n’ouïs que louanges de vos actions !
-En obéissant à la volonté de votre majesté, je ne fais que mon devoir, Sire.
-Le devoir est une chose, la loyauté en est une autre. J’ai l’intention de vous nommer à la charge de Lord du sceau privé… Vous succèderez ainsi au Comte de Wiltshire, le père de ma défunte épouse et abandonnerez de fait votre fonction de maître des rôles.
-C’est un honneur, Sire. »
Londres 1536. Henri VIII, père de Marie Tudor, adoube Thomas Cromwell au rang de Baron. Ce titre sonne à ses oreilles comme la plus douce des récompenses. Pendant que le Roi s’occupe d’affaires internes, il envoie sa fille Marie, à York, pour qu’elle persuade John Hussey de renoncer à l’insurrection. Pour elle, son père se trompe d’adversaire. C’est Robert Aske qui mène les insurgés. Elle refuse la mission. Qu’importe ! Cromwell se chargera de mener la répression. L’homme va cristalliser les haines. Il est l’incarnation de l’intolérance du Roi, de son fanatisme et de la violence aveugle dans cette guerre de religions. Pour Cromwell, il est nécessaire de chasser les suppôts de l’Eglise du Pape qui noyautent les monastères.
Marie Tudor refuse de se prêter à un mariage arrangé pour consolider la position de son père au sommet de l’Europe. Là encore, Cromwell est envoyé aux négociations. Il invite celle qui a pour l’instant renoncé à ses prétentions au trône à reconsidérer son point de vue. Qu’elle réfléchisse au bénéfice personnel qu’elle pourrait en tirer. Entre Cromwell et elle, le torchon brûle. Elle n’a aucune estime pour cet homme qui incarne le bras armé d’une autorité despotique qu’elle désapprouve. De son côté, son père va se marier pour une énième fois. Cromwell, toujours lui, lui présente le portrait qu’il a fait peindre de celle qu’il prévoit comme épouse pour son souverain afin de renforcer les alliances internationales. Henri VIII se laissera-t-il séduire ?
Corbeyran traite l’Histoire façon thriller psychologique. Dans ce deuxième épisode, Marie Tudor reste en position d’observatrice. Elle fait preuve d’un sang froid et d’une maîtrise de soi impressionnante. Thomas Cromwell est l’éminence grise de son père. L’histoire du portrait est un véritable gag historique, comme si avait été inventée ce jour-là l’expression de comédie dramatique. On se croirait dans une parodie télévisée. Et pourtant, l’anecdote est véridique. Marie va pouvoir regarder Cromwell, comme on dit vulgairement, se crasher en plein vol. elle n’aura plus qu’à ramasser ce qui devrait lui revenir de droit, mais ça, ce sera l’objet du troisième et dernier tome. Claudio Montalbano laisse la vedette aux personnages historiques. C’est propre, c’est net. Ça pourrait sembler passe-partout mais Montalbano réussit à exprimer sa personnalité dans certaines cases plus lâchées.
Souvent, les bandes dessinées historiques sont bourrées de récitatifs et ont du mal à se détacher d’une approche détaillée et scolaire. Leurs auteurs n’ont qu’à lire Corbeyran. La construction de cette série est exemplaire. Le scénariste ferait aimer l’Histoire aux réfractaires parce qu’il démontre que, quand c’est bien fait, ça se lit comme une BD d’aventure.
Série : Les reines de sang
Tome : Marie Tudor la reine sanglante 2
Genre : Histoire
Scénario : Corbeyran
Dessins : Claudio Montalbano
Couleurs : Jean-Paul Fernandez
Éditeur : Delcourt
ISBN : 9782413044819
Nombre de pages : 56
Prix : 14,95 €