Paris maquis
« -C’est gentil, chez vous
-Nous sommes chez un membre du comité d’aide qui nous prête son logement pour une heure.
-Fontaine, renseignement.
-Picpus, armurier.
-Et ton nom de guerre ? Tu l’as trouvé finalement ?… Allez, on n’a pas 107 ans.
-C’est bon !… Rainer ! Comme Rainer Maria Rilke !
-N’importe quoi !! C’est un prénom de boche, ça !! T’es pas folle !?
-Moi, je trouve que la petite a une très bonne idée ! Après tout, on n’est pas en guerre contre le peuple allemand. Mais contre les nazis. On le prononcera à la française, et puis voilà. »
Paris 1942. Madeleine Riffaud, encore mineure, prend le métro pour se rendre chez Paul. La jeune femme a un rendez-vous clandestin. Elle rencontre les membres d’un réseau de Résistance afin de les rejoindre. Il lui faut un nom de guerre. Un coup d’œil sur une étagère et c’est décidé. Ce sera Rainer, comme Rainer Maria Rilke. Il n’y aura qu’à le prononcer à la française. Sa première mission sera d’écrire un tract. Madeleine sera l’une des membres clefs du réseau. Faire semblant, paraître normale, parfois s’habiller à la mode pour passer inaperçue, elle est dans l’apparence de la légalité. Le sourire permet de passer les contrôles des allemands qui aiment bien « les petites femmes de Paris ». Le maître-mot de Madeleine est convaincre. On n’est pas vaincus. L’armistice n’est pas signé. Il faut lutter.
Le maquis de Madeleine Riffaud, c’est Paris. C’est ce qu’elle raconte dans ce tome 2 de la biographie de ses années de guerre. L’une des dernières résistantes encore vivantes raconte à Jean-David Morvan comment elle a vécu l’occupation. En 1943, grâce à l’unification des mouvements résistants sous l’égide de Jean Moulin, la guérilla s’est intensifiée, avec les moyens du bord. En 1944, avec le débarquement et leurs défaites sur tous les fronts, les nazis sont devenus de plus en plus cruels. La tragédie d’Oradour sur Glane sera le plus grand massacre de civils en France. Les actes de tortures se multiplient.
On ne quitte jamais Madeleine, la narratrice, dans cette série témoignage d’utilité publique. C’est Raymond Aubrac qui le premier en 1994 a convaincu Madeleine Riffaud qu’il était nécessaire de raviver sa mémoire pour dire, pour se souvenir, pour que leurs camarades morts à dix-sept ans restent dans la postérité. Quand Jean-David Morvan lui a proposé de recueillir ses souvenirs en bande dessinée, elle l’a envoyé sur les roses : « Une BD ? Mais c’est pour les mômes, ça ! ». C’est son ami le réalisateur Jorge Amat qui lui a dit qu’elle était bête de refuser, que la bande dessinée était le moyen de faire passer le message à un nouveau public car on peut tout y raconter. Qu’il en soit chaleureusement remercié car sinon on n’aurait jamais tenu cet album dans les mains. Au dessin, Dominique Bertail installe son trait réaliste dans une émotion incommensurable. Des résistants qui courent dans la rue, une fusillade dans une librairie, un baiser hollywoodien dans la nuit enneigée, l’explosion d’une colonne de camions, chaque scène est plus forte que la précédente. Le rouge-sang est transformé en bleu-Bertail.
Si Madeleine a réussi à survivre, c’est aussi grâce à la poésie. Cette histoire démontre à quel point cet art a pu être salvateur. Plus qu’un témoignage, plus qu’un devoir de mémoire, Madeleine, résistante est une Œuvre majuscule.
Série : Madeleine, Résistante
Tome : 2 – L’édredon rouge
Genre : Biopic
Scénario : Jean-David Morvan & Madeleine Riffaud
Dessins & Couleurs : Dominique Bertail
Éditeur : Dupuis
Collection : Aire Libre
ISBN : 9791034747979
Nombre de pages : 128
Prix : 23,50 €