Intouchables 2 ou L’infirmier et le cinéaste
« -Je le savais déjà. C’était la meilleure manière pour toi de l’apprendre. Si c’était moi qui te l’avais dit,tu te serais énervé.
-Gardons ça pour nous.
-J’ai engagé un infirmier.
-Avec quel argent ?
-Je sais pas, mais Neno ne peut pas rester tout seul comme ça. »
Buenos Aires, l’oncologue vient d’apprendre une mauvaise nouvelle à la famille de Neno. Le réalisateur est atteint d’un cancer en phase terminale ; Alité depuis semaines, hormis quelques moments sur son fauteuil roulant, Neno soufre. Il soufre en particulier énormément du bras car la tumeur lui compresse un nerf. Pour l’accompagner, un infirmier est engagé. Plus qu’un accompagnant, plus qu’un soignant, il va être les bras, les jambes de Neno, ainsi que le témoin privilégié de la vie d’un homme, vie qui a été bien remplie, mais vie qui a encore des choses à faire, avant qu’il ne soit trop tard, avant une issue que l’on devine inéluctable.
Rodolfo était le père de Juanungo, l’auteur de cette bande dessinée. Cet album s’inspire de ses derniers mois. Comme lui, Neno est un réalisateur non pas de dessin animé, mais de cinéma d’animation. L’animation ne se limite pas à la technique du dessin. Lui, il travaille avec des marionnettes, non pas avec la main dedans comme pour celles du Muppet Show, mais en stop-motion, comme dans L’étrange Noël de Monsieur Jack. Neno possède un studio dans l’arrière-cour de sa maison. Avec quelques amis, il doit réaliser un spot publicitaire pour la télévision. Le destin de la lingette nettoyante Elégant, l’atout le plus distingué de la ménagère, est entre ses mains.
Juanungo est à mille lieues graphiques de ce qu’on a pu voir sur Donjons. Le dessinateur s’efface derrière l’histoire pour laisser ses acteurs s’exprimer. Cet infirmier qui n’a pas de nom, comme pour symboliser son dévouement, le dévouement d’une profession, joue un autre rôle que celui d’Omar Sy dans Intouchable. Alors que le comédien jouait tout en excentricité et dynamisme, le personnage de papier est plus discret, mais n’en a pourtant pour autant pas moins de personnalité. Concernant le rôle joué par François Cluzet, et ici par Neno, pas question pour le malade de subir. Il reste maître de ses choix. On se doute, on sait même comment cela va finir, mais l’individu ne lâchera rien tant qu’il aura des choses à faire. Les deux hommes ne se laissent pas guider par leur dessinateur. Ce sont eux qui l’embarquent dans ce torrent d’émotion, eux et une lingette. C’est elle qui prend la vedette dans la dernière partie de l’album, dans un flip book où un bout de chiffon danse comme la plus grande des artistes. Si l’on vous disait qu’un jour vous auriez une larme au coin de l’œil à cause de ça, vous ne le croiriez pas ? Lisez l’animateur et constatez par vous-même.
On n’en est pas encore à l’été que l’on se demande comment on pourra faire une sélection en fin d’année tant il y a d’albums incroyables qui sont parus. L’animateur fait partie de ceux-là.
One shot : L’animateur
Genre : Emotion
Scénario & Dessins : Juanungo
Éditeur : Delcourt
Collection : Shampooing
ISBN : 9782413077633
Nombre de pages : 256
Prix : 19,99 €