Journal d’un vampire
« -Anna, depuis ton retour je suis le plus maudit des hommes, la plus malheureuse des créatures ayant jamais vécu. Je te dois ces aveux… S’il est une existence que je ne veux abréger, c’est la tienne. Pour t’épargner, je n’ai d’autre choix que de disparaître. C’est toi ou moi. Or, j’exige que tu vives. Je te dois ces aveux, car il y a plus de deux siècles, je t’ai tuée. »
Harlem, New-York City, années 2000. Adrian laisse dormir Anna, son amour qu’il a droguée. Il va préparer son suicide dont il a fixé la date. Mais avant ça, il va raconter ses souvenirs, en remontant deux cents ans auparavant, à l’époque où il a tué Anna. S’il veut aujourd’hui mettre fin à ses jours, c’est pour éviter qu’il ne l’assassine une seconde fois, un comble pour lui qui l’a attendue pendant deux siècles. Lorsqu’il l’a retrouvée il y a un mois à peine, il pensait sa damnation terminée. Il n’en est rien. Il ne parvient pas à contrôler le monstre en lui. C’est à Venise en 1784 qu’Adrian et Anna se sont aimés, alors qu’elle s’appelait Clélia. Après leur premier baiser, lorsque leurs lèvres se sont séparées, ils n’étaient plus les mêmes physiologiquement. Dépossédée de toute émotion, la jeune femme se jettera dans le vide. Ce fut le premier assassinat d’Adrian.
Pendant qu’au fil des siècles, Adrian embrasse annihilant les âmes, de nos jours, Anna enquête sur ses absences, se demande pourquoi il se refuse à elle depuis leur premier baiser et imagine les hypothèses les plus effroyables. Des relations troubles entre ses parents à Venise au baiser à sa mère, de son départ en bateau pour Constantinople à cette nuit d’amour mémorable où il perdit sa virginité, Adrian découvre et tente d’apprivoiser son dangereux pouvoir. Le temps n’a pas de prise sur lui. 1792, de jeunes aristocrates décadents l’entraînent dans une orgie à Sarajevo. Il va voir Paris brûler sous la révolution française puis retourner à Venise pour les derniers jours de son père. Ses voyages seront rythmés par des tragédies et des amours contrariées, jusqu’à ce jour où sur un pont de New-York elle lui réapparut.
Le voleur d’amour est à l’origine un roman de Richard Malka publié en 2021 chez Grasset. Il se voit déjà adapté en bande dessinée par Yannick Corboz. Cette histoire d’amour à travers les siècles revisite le mythe du vampire. Pas d’incisives ni de chauves-souris, un peu de sang, mais sans trop d’éclaboussures. Adrian vampirise les âmes par ses baisers, comme s’il absorbait le passé de ses victimes. Mais comment aimer quand embrasser peut-être fatal ? Corboz transcende l’aventure de ce voleur d’amour dans de sublimes planches réhaussées par sa façon de poser les couleurs qui n’appartiennent qu’à lui. Un seul petit regret : l’album relève plus du roman illustré que de la bande dessinée avec trop peu de dialogues. Les phylactères sont quasi-absents au profit de cartouches récitatifs. Ça n’enlève rien à la majesté de la fresque.
Le voleur d’amour subtilise les âmes de ses rencontres. Faites attention, il risque aussi de partir avec la vôtre dans cet album à la maquette somptueuse qu’il est impossible de refermer avant la fin.
One shot : Le voleur d’amour
Genre : Drame d’amour
Scénario, Dessins & Couleurs : Yannick Corboz
D’après : Richard Malka
Éditeur : Glénat
ISBN : 9782344052358
Nombre de pages : 200
Prix : 36 €