Danse ta vie, vis ta danse
« -Tu te demandes comment interpréter Senzai ?
-Oui… Jusqu’ici, cette pièce ne représentait qu’un rituel ancien pour moi.
-Mais dans Okina ce matin, il y avait quelque chose d’autre que la danse de mon père que je connais… »
Japon, XIVème siècle. Oniyasha poursuit sa quête de sens dans la danse théâtralisée. Il a appris grâce à une danseuse que l’art est un moyen d’exister grâce à son corps, comme un don de soi. Aujourd’hui, en plein mois de juin, le festival d’été au sanctuaire Imakumano de Kyoto ouvre ses portes pour trois jours. Cinq à sept pièces de Sarugaku sont jouées chaque jour, du matin au soir, en guise d’offrande aux divinités. L’ambiance est festive. Oniyasha interprète Senzai, un rôle dans Okina, une pièce qui se joue tous les matins afin de purifier la scène. Il partage ses appartements avec l’acteur qui joue l’un des rôles principaux. Il va falloir aller se coucher pour être en forme. Mais avant cela, le jeune comédien tient à répéter encore et encore ses mouvements. Le type de théâtre qu’est le Sarugaku a pratiquement été créé par Kan’ami, son père. Il y a apporté la danse, le chant et le récit. Il a distordu les codes pour les redistribuer dans une certaine modernité. Dans la pièce Okina, on n’adapte pas son rythme à celui des autres, mais il faut danser comme si on passait entre les battements. Il y a comme un secret dans cette danse, secret qu’Oniyasha voudrait bien percer.
Tout en cherchant la meilleure façon d’évoluer, le meilleur moyen de jouer, le garçon va grandir dans son corps et dans sa tête. Il va assister à un coït -oui, oui, vous avez bien entendu- avant de le voir reproduit sur scène. Manger, s’accoupler, se multiplier et prospérer, les arts visuels accompagnent la vie humaine, la paix dans le monde et la sécurité sur les terres. La vie, le corps, les émotions et les espoirs des hommes sont nés de ce courant. Oniyasha prend conscience qu’il est debout avec son corps. Dans son art et dans ses veines coule l’histoire. La fleur qu’il est s’épanouira-t-elle sur scène en offrant aux spectateurs ce qu’ils cherchent ?
En postface, l’historien Katsuyuki Shimizu décrit une réalité médiévale japonaise oubliée. L’auteur a initié un engouement pour l’époque Muromachi (1336-1573). Il montre comment Kan’ami, le père d’Oniyasha qui sera connu sous le nom de Zeima, va poser les bases d’un théâtre établi à partir de rituels. C’est ainsi que son fils a fait du nô un art théâtral plus tourné vers les humains que vers les divinités.
« The world is dancing » est supervisé par Kôhei Kawaguchi, figure incontournable de la scène contemporaine de nô. On apprend qu’à l’origine le nom nô englobait avec le théâtre chant, danse et acrobaties, avant que le théâtre masqué ne s’impose parmi ces arts.
Ode à la contemplation et au corps en mouvement, avec « The world is dancing », Kazuto Mihara donne à la danse et au théâtre leur raison de vivre.
Série : The world is dancing
Tome : 2
Genre : Emotion
Scénario & Dessins : Kazuto Mihara
Éditeur : Vega – Dupuis
ISBN : 9782379504532
Nombre de pages : 192
Prix : 11 €