Willem for ever
« -Merci pour ce festin, Isabel ! J’avais besoin d’un dernier bon repas avant ma retraite auvergnate !
-Je lève mon verre à votre prompt rétablissement, Edmond !
-Et ce cognac est une merveille, Louis ! J’ose à peine imaginer son âge…
-Il date de 1720, Edmond ! Une excellente année !
-Je crois me souvenir que c’est l’année où vous vous êtes rencontrés, n’est-ce pas ? »
Ambremer, 1720. La Reine est en plein désarroi. L’élixir d’oubli a été dérobé. Il faut absolument le récupérer avant qu’il ne soit utilisé sur Terre. Seul le cercle de Gélancourt pourrait l’aider, mais elle a du mal à se résoudre à faire confiance en des humains. Paris 1910. Louis Denizart Hippolyte Griffont, mage du cercle Cyan, se remémore avec ses amis ce qu’il s’est passé 190 ans plus tôt et sa rencontre avec Isabel. Il se rappelle de ce soir où son ami Raynaud, un dragon, s’est fait assassiner en rentrant chez lui, tué par une balle de sélénium noir, un métal qui ne se trouve que dans l’outremonde. Rappelons que les êtres du monde parallèle qui viennent sur Terre sont contraints de conserver une apparence humaine. Alors que l’on suit cette enquête dans le passé, deux siècles plus tard, Griffont ne se doute pas encore qu’elle va avoir un sombre écho.

Au niveau scénaristique, on est sur une enquête militaro-politique où la cape et l’épée se mêlent à la fantasy. On est dans un début de guerre civile où les cercles de mages tirent les ficelles de la diplomatie. On pourrait faire un parallèle avec la franc-maçonnerie. La double époque de l’histoire ne rend pas le récit facile à suivre, d’autant plus que ni Willem ni Capia n’utilisent d’artifices visuels pour les distinguer, si bien que l’on se perd parfois. Même si les personnages que l’on retrouve de l’une à l’autre ne sont pas costumés pareil, il faut de la concentration pour rester dans la bonne époque. C’est une adaptation. Il n’y a pas la fluidité des Artilleuses, série parallèle originale, et c’est dommage. Peut-être aurait-il fallu plus de tomes par épisode.

Quelle émotion ! Mais quelle émotion de tenir entre les mains le dernier album d’Etienne Willem, tragiquement disparu en 2024. Il avait entièrement adapté et story-boardé l’histoire. Il avait finalisé les quinze premières planches. Ça ne pouvait rester inachevé. En accord avec sa famille, l’éditeur s’est mis à la recherche de quelqu’un capable d’assurer la relève. C’est là que Christophe Arleston tombe sur des dessins de l’illustratrice Capia. La jeune femme a chaussé les bottes de Willem pour conclure le livre, et s’attaquera après à la suite de l’adaptation des romans de Pierre Pevel. C’est graphiquement incroyable. Les néophytes n’y verront que du feu.
En fin d’album, un cahier graphique rend hommage à l’immense talent de Willem avec des croquis, de lui et de Capia, et surtout des images du projet Clans of London sur lequel il travaillait en parallèle. Ça promettait.

La magie du Paris des merveilles fait entrer le fantastique dans la réalité. Etienne Willem nous laisse une transposition fidèle de l’univers de Pevel, que Capia va poursuivre dans le plus pur respect de son prédécesseur. Un récit intriguant, et pour le coup, émouvant.
Série : Le Paris des merveilles
Tome : 3 – L’élixir d’oubli 1/2
Genre : Aventure semi-fantastique
Scénario : Etienne Willem
Dessins : Etienne Willem & Capia
Histoire originale et dialogues : Pierre Pevel
Couleurs : Tanja Wenish
Éditeur : Bamboo
Collection : Drakoo
ISBN : 9782382332245
Nombre de pages : 80
Prix : 15,90 €



